Stasi, commission
La Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République a été mise en place par le président de la République française Jacques Chirac qui en a confié la présidence à Bernard Stasi, alors médiateur de la République française. Composée de 20 membres, elle a organisé des auditions de partenaires sociaux de toutes sensibilités. Ses conclusions sont rendues dans un rapport du 11 décembre 2003, publié à la Documentation française. On y lit : « La liberté de conscience, l’égalité de droit, et la neutralité du pouvoir politique doivent bénéficier à tous, quelles que soient leurs options spirituelles. Mais il s’agit aussi pour l’État de réaffirmer des règles strictes, afin que ce vivre en commun dans une société plurielle puisse être assuré. La laïcité française implique aujourd’hui de donner force aux principes qui la fondent, de conforter les services publics et d’assurer le respect de la diversité spirituelle. » Le rapport fait un rappel historique de la laïcité, dont la Révolution marque la date de naissance. En dépit de conflits douloureux, d’omission et de compromis, elle s’est imposée petit à petit à la République par son pragmatisme, comme principe essentiel. La France a séparé pouvoir politique et pouvoir religieux et établi un dialogue avec les différentes composantes religieuses, spirituelles, philosophiques. L’islam, religion la plus récemment implantée en France, a droit comme les autres au respect de sa culture, et comme les autres aussi le devoir de s’intégrer dans une société laïque qui fait coexister des individus ne partageant pas forcément les mêmes convictions. La traduction juridique en est la tension entre la neutralité de l’État laïque et la revendication de liberté religieuse.
Le rapport fait un relevé de la jurisprudence en ce domaine. Après un rapide tour d’Europe, qui montre un ensemble de convergences, il propose que soient réglés dans le détail et de façon pragmatique tous les points qui compromettent l’équilibre entre les différentes composantes religieuses et philosophiques, mais il soulève également les difficultés que peuvent rencontrer les services de l’État face à des comportements contraires aux principes de neutralité : à l’école, à l’hôpital, dans le secteur de la justice. Le voile, problème emblématique, met en lumière des comportements communautaristes politico-religieux qui s’accompagnent d’une négation du droit à l’égalité, et suscite des réactions de rejet : régression du statut des femmes et sexisme, racisme, xénophobie, antisémitisme, discriminations.
Pour conclure, le rapport propose que la laïcité soit enseignée, promue, défendue. L’État doit en rappeler les règles, car la « laïcité française implique aujoturd’hui de donner force aux principes qui la fondent, de conforter les services publics et d’assurer le respect de la diversité culturelle ». Le rapport se termine en demandant l’adoption d’une loi sur la laïcité qui affirmerait la neutralité des agents de l’État et le respect de la diversité culturelle.
Il faudra attendre la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires pour que soit inscrit dans un texte législatif :
« Le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité. Dans l’exercice de ses fonctions, il est tenu à l’obligation de neutralité. »
« Le fonctionnaire exerce ses fonctions dans le respect du principe de laïcité. À ce titre, il s’abstient notamment de manifester, dans l’exercice de ses fonctions, ses opinions religieuses. »
« Le fonctionnaire traite de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité. […] »
J.P.
« Laïcité et République », Rapport au président de la République, La Documentation française, 2003.