Relativisme culturel
La notion de relativisme culturel s’est développée en même temps que les sciences sociales, et en particulier l’anthropologie, abandonnaient les théories évolutionnistes et l’idée d’une hiérarchie des sociétés humaines. Le relativisme postule que les déterminations sociales comme les croyances d’un individu ne peuvent être comprises que du point de vue de sa culture, de ses traditions, de ses institutions et de ses pratiques sociales propres.
Vue d’une manière plus radicale, elle s’oppose frontalement à l’universalisme en considérant qu’il ne peut y avoir de morale absolue ou universelle, mais que les valeurs morales ne valent que dans le cadre de leur environnement culturel. Elle entraîne une posture de neutralité, c’est-à-dire le refus de porter un jugement de valeur sur des pratiques d’autres cultures, quand bien même sont-elles en conflit avec une morale ou un droit supposés universels, tels qu’énoncés par la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 ou la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales de 1950. Dans le discours post-colonial ou post-moderne, en particulier, la reconnaissance de l’égale dignité de tous les individus suppose cette équivalence, qui rend l’universalité des droits aléatoire, dans la mesure où tout jugement sur les valeurs d’un groupe, d’une société ou d’une culture par une autre prendrait la forme d’un ethnocentrisme occidental, reflétant la soumission de supposées subcultures à une présumée culture dominante.
Les sociétés occidentales étant non seulement de plus en plus multiculturelles, mais aussi marquées par la fragmentation culturelle (selon le sociologue Norbert Elias), le traitement de la diversité favorise le relativisme culturel et les rapports sociaux s’y lisent de plus en plus à travers un prisme culturel. D’aucuns estiment en effet que les individus sont intrinsèquement liés à leur communauté d’origine et que leur différence culturelle commande en certaines circonstances de les traiter en fonction de leurs valeurs propres. Cette propension se retrouve dans la pensée communautarienne, dans certaines politiques multiculturelles, dans les attendus de certains jugements des cours et tribunaux, et jusque dans le droit de certains États, comme certaines provinces du Canada.
Jean-Philippe Schreiber, Dictionnaire de la Laïcité (2°édition)