Darwin, Charles
Naturaliste et biologiste anglais qui a établi la théorie de l’évolution des espèces et formulé l’hypothèse de la sélection naturelle. Il est le cinquième de six enfants, né le 12 février 1809 en Angleterre. Son père relativement fortuné est médecin et libre penseur. Le reste de la famille a adopté l’anglicanisme, mais pratique l’unitarisme (les unitaristes sont des chrétiens qui ne reconnaissent pas la Trinité et pour lesquels Dieu est un). Charles, qui a fait des études de théologie, va peu à peu perdre la foi et vers la fin de sa vie il écrit « c’est l’agnosticisme qui décrirait de la façon la plus exacte [mon] état d’esprit ».
À 22 ans il sort diplômé de Cambridge et s’embarque en décembre 1831, sur le Beagle, comme naturaliste dans un voyage scientifique chargé d’établir la cartographie des côtes de l’Amérique du Sud. Il observe la géologie, mais également la flore, la faune locale et les fossiles. De l’Amérique du Sud, aux îles polynésiennes, en passant par l’Australie, et la Nouvelle-Zélande, l’expédition va durer 4 ans et 9 mois. Il est émerveillé, conforté dans ses idées que les espèces ne sont pas figées, indigné par l’esclavage. « Ce voyage sur le Beagle, dit-il, fut de loin l’événement le plus important de ma vie. Il a déterminé toute la suite de mon travail scientifique. » Dans son journal Le voyage du Beagle, il récapitule ses observations, et fournit toutes sortes d’informations, sociales, politiques, anthropologiques, sur les pays qu’il visite.
Revenu en Angleterre Darwin poursuit ses recherches pour la description des ses collections de fossiles, publie des articles, se fait connaître de la société scientifique, et commence à travailler à sa théorie de l’évolution. L’idée est dans l’air du temps et Darwin suit le transformisme de Lamarck, et les hypothèses de Charles Lyell, mais il va les dépasser. De 1839 à 1854, il publie plusieurs ouvrages importants sur les espèces. Enfin, son ouvrage le plus connu paraît le 24 novembre 1859 L’origine des espèces et la théorie de la descendance modifiée par le moyen de la sélection naturelle. Il y développe deux théories. La première est que les organismes vivants sont en perpétuelle évolution grâce au phénomène de la sélection naturelle qui au sein d’une même espèce retient les individus les mieux adaptés à leur milieu. Les individus porteurs d’une variable héritable, momentanément avantageuse par les conditions du milieu se reproduiront davantage. La deuxième est que toutes les espèces descendent d’un ou plusieurs ancêtres communs.
Ces théories bouleversent la vision chrétienne et traditionnelle d’explication du monde et de la création. C’est une remise en cause de la croyance que les êtres vivants ont été créés par Dieu. La polémique est vive dans le milieu scientifique, elle s’étend aux autorités religieuses. Cependant L’origine des espèces connaît un grand succès et il est traduit en plusieurs langues.
Darwin continue à travailler avec acharnement malgré des problèmes de santé et publie encore de nombreux ouvrages. Il meurt le 19 avril 1882. Il est enterré à l’abbaye de Westminster.
Cependant, Darwin a subi de nombreuses accusations déformant ses théories. On lui impute le darwinisme social, le néo-malthusianisme, l’eugénisme, l’expansionnisme colonial, l’esclavagisme, le racisme scientifique. On lui reproche de mettre en avant la loi du plus fort, de justifier les inégalités (de toutes sortes, physiques, financières, sociales), de promouvoir l’élimination des plus faibles. Les comportements sociaux sont régis par des mécanismes génétiques et par le principe de la révélation naturelle. Ce déterminisme réductionniste est adouci, en apparence, par des sociobiologistes qui élaborent une psychologie évolutionniste, mais le principe de base reste le même. Des gènes spécifiques retenus par la sélection naturelle commandent les comportements sociaux.
Darwin est rendu indirectement responsable du créationnisme, mouvement religieux protestant fondamentaliste, né en réaction au darwinisme et qui défend l’idée d’un monde créé par Dieu comme il est écrit dans la Bible il y a 6 000 ans. Un courant met en avant l’idée d’un « dessein intelligent », adaptation moderne du créationnisme. Il accepte l’idée de l’évolution, mais elle a été pilotée par une puissance divine. Pas de hasard dans la création de l’homme, dont l’évolution à travers des millénaires est programmée par Dieu. Le créationnisme et le néo-créationnisme se posent comme religions, mais aussi comme thèses scientifiques d’explication du monde et de la diversité du vivant.
Cependant pour de nombreux scientifiques Darwin est un jalon essentiel de la science moderne. Hervé Le Gudayer du CNRS écrit en 2009 « La théorie de l’évolution au sens darwinien du terme est actuellement le meilleur cadre conceptuel que nous ayons à notre disposition pour comprendre rationnellement l’instabilité du vivant, pour penser un monde naturel essentiellement dynamique. »
Enfin s’il existe une dérive de la pensée de Darwin, il n’en est pas responsable. Pour sa part il fut anti-esclavagiste et loin de réclamer l’élimination des plus faibles il voit dans la protection de ces derniers l’indice du degré de civilisation et récuse totalement l’eugénisme.
Geneviève Montastier Dictionnaire de la Laïcité (2°édition)